vendredi 10 février 2012

Serge Gainsbourg - La recette de l'amour fou 2

Congé au vent

Bonnard, L'atelier au mimosa


   A flancs de coteau du village bivouaquent des champs fournis de mimosas. A l'époque de la cueillette, il arrive que, loin de leur endroit, on fasse la rencontre extrêmement odorante d'une fille dont les bras se sont occupés durant la journée aux fragiles branches. Pareille à une lampe dont l'auréole de clarté serait de parfum, elle s'en va, le dos tourné au soleil couchant.
     Il serait sacrilège de lui adresser la parole.
   L'espadrille foulant l'herbe, cédez-lui le pas du chemin. Peut-être aurez-vous la chance de distinguer sur ses lèvres la chimère de l'humidité de la Nuit ?

"Seuls demeurent", in Fureur et mystère. René Char




samedi 4 février 2012

L'offrande à la Nature

 Dieu que la campagne était belle aujourd'hui !
Ce soleil merveilleux de début d'après-midi qui la réchauffait doucement, réchauffait la terre ; ces quelques parcelles gelées ici et là sur l'Yèvrette lorsque je la traversais en voiture direction la Touraine ; la lumière se jouant à travers les arbres dénudés. Tout était beau et tout respirait la vie malgré ce froid transperçant de l'hiver. Jusqu'au petit troupeau de chevaux que je croisais, la robe miroitant au soleil, l'un d'eux se relevant majestueusement de terre de ce mouvement noble et sauvage qui leur est bien particulier lorsque j'arrivais à leur hauteur. 
En moi montait alors naturellement cette poésie d'Anna de Noailles, "L'Offrande à la Nature". J'aime la poésie intimiste d'Anna de Noailles, elle est toujours pour moi comme une mélodie doucement murmurée, dans laquelle je me retrouve, surtout dans son recueil Le Coeur innombrable. Et j'y trouve toujours beaucoup d'apaisement. Ce poème c'est un peu de moi, mon portrait quelque part.

"Nature au coeur profond sur qui les cieux reposent,
Nul n'aura comme moi si chaudement aimé
La lumière des jours et la douceur des choses, 
L'eau luisante et la terre où la vie a germé.

La forêt, les étangs et les plaines fécondes
Ont plus touché mes yeux que les regards humains,
Je me suis appuyée à la beauté du monde
Et j'ai tenu l'odeur des saisons dans mes mains.

J'ai porté vos soleils ainsi qu'une couronne
Sur mon front plein d'orgueil et de simplicité.
Mes jeux ont égalé les travaux de l'automne
Et j'ai pleuré d'amour aux bras de vos étés.

Je suis venue à vous sans peur et sans prudence, 
Vous donnant ma raison pour le bien et le mal,
Ayant pour toute joie et toute connaissance
Votre âme impétueuse aux ruses d'animal.`

Comme une fleur ouverte où logent des abeilles
Ma vie a répandu des parfums et des chants,
Et mon coeur matineux est comme une corbeille
Qui vous offre du lierre et des rameaux penchants.

Soumise ainsi que l'onde où l'arbre se reflète
J'ai connu les désirs qui brûlent dans vos soirs
Et qui font naître au coeur des hommes et des bêtes
La belle impatience et le divin vouloir.

Je vous tiens toute vive entre mes bras, Nature,
Ah ! Faut-il que mes yeux s'emplissent d'ombre un jour
Et que j'aille au pays sans vent et sans verdure
Que ne visitent pas la lumière et l'amour... "

                                                            in Le Coeur innombrable.

mercredi 1 février 2012

Ne reste qu'un pot de miel et un goût amer dans la bouche

Ce n'était donc que pour un bref instant...  Alors après les Diana Ross, les Bonnie Tyler, ABBA, chantés à plein poumons pour s'exorciser, fredonner un peu de Guy Béart a son bon aussi.

Ce n'est jamais, jamais, jamais pendant,
C'est après que ça se passe
Les regrets vous entrent, rentrent dedans
Après que le fil se casse 


Sur le moment on est abasourdi
On se dit quoi, on se dit, on se dit
Je ne sais pas ce qui m'arrive à moi,
J'ai trop chaud, j'ai froid 


Qu'est-ce donc qui m'éveille ainsi autant
Et pourquoi soudain ce cœur battant
Je me retourne encore dans mon lit
Ta place a fait ce pli 


Ce n'est jamais, jamais, jamais pendant,
C'est après que ça se passe
Mon Dieu que c'était imprudent
De changer ainsi de place 


Ah si l'on avait su, l'on avait su
On aurait gardé notre coin perdu
Tous ce voyages que l'on s'est permis
Et tous ces amis 


Tant de mots perdus tant de regards
Et quand je t'ai conduite à la gare
On était libres tous deux c'est sûr
Pourquoi cette blessure


Ce n'est jamais, jamais, jamais pendant,
C'est après que ça se passe
Qui est le vainqueur, qui est le perdant
On en a perdu la trace 


Qui est parti, est parti le premier
Qui a couru après dans l'escalier
Qui a marché et qui est revenu
Ça ne compte plus 


Qui a fait mal et qui a trop souffert
Que m'importe, tout va de travers
Et l'enfant, l'enfant que tu aimais
Qui n'arriva jamais 


Ce n'est jamais, jamais, jamais pendant,
C'est après que ça se passe
L'amour, la vie, tout devient évident
La brûlure est là, vivace 


On s'appelle, on se dit Allo Allo
Souviens-toi du dimanche au bord de l'eau
De cette foire où tu as pris la fuite
Tout près du grand huit 


Tu riais, tu riais aux grands éclats
Je regardais ailleurs ce jour-là
Et j'ai beau regarder aujourd'hui
Je ne vois que la nuit 


Ce n'est jamais, jamais, jamais pendant,
C'est après que ça se passe
On n'a rien senti pendant l'accident
Rien senti de la menace 


On s'est dit au revoir en souriant
Copain-copain, tranquille, insouciant
Je t'ai serré un peu entre mes bras
On s'appellera 


Ce prochain rendez-vous manqué, grippé
Le veux-tu ? On va le rattraper
Tout cela vient trop tard, vient trop tard
Il est minuit et quart